Grandiose Flocons de Sel à Megève
Si la neige est partie en congés, la pureté de l’épais manteau blanc fondu semble encore planer. Les pâturages rayonnent d’un vert éclatant sous les assauts du soleil. A en croire les cloches qui tintent au loin, les vaches s’en donnent à coeur joie et se délectent de ces mets de choix. C’est en plein coeur de cette nature, sur les hauteurs de Megève, que les sens vagabondent, les esprits se perdent dans la légèreté, les émotions se cristallisent. Une expérience qui relèverait presque du fantasme.
Spotted : un cuisiner coupe des branchages à notre arrivée
Tomates noires de Crimée, tagète anisé et agastache, eau des peaux glacée
Millefeuille de légumes tiède « sans pâte », saveurs des prés et des jardins
2 millimètres de polenta, jus au parfum des sous bois
Champignons sauvages de nos montagnes « selon les ramasses »
Moelleux de racine de raiponce et petits pois, bouillon de cosses à la berce
Langoustines juste pochées, capucine, gentiane des Aravis
Féra du lac Léman Eric Jacquier
Ecrevisses moelleuses, amandes et jus des carcasses
Biscuit de brochet du Léman, bouillon d’oignons et champignons
Cèpe en croûte
Pigeon fermier légèrement fumé au genièvre, oxalis et légumes nouveaux
Agneau de l’Aveyron cuit en cocotte d’herbes, champignons sauvages
Meringue, glace au lait d’alpage et rhubarbe clous de girofle et Carré fraises hachées de montagne et Campari
Tarte chaude au chocolat fumé, glace au bois
Le chef, Emmanuel Renaut
Si la gravité nous fait irrémédiablement garder les pieds sur terre, il existe des bulles qui nous emmènent flotter très haut. Au Flocons de Sel l’ascension vers le plaisir se faufile par des instants vaporeux. L’unité de temps est ré-inventée au son des multiples coucous qui sonnent sans aucune logique horlogère. Bienvenue dans un monde délicieusement évanescent.
Dès les premières bouchées, la tomate invite à briser la glace. Prise de température rafraîchissante, rarement une mise en bouche a si bien porté son nom. On découvre le pain fait maison, le beurre produit localement, la table immaculée et tous les détails soignés. Dans son écrin végétal, le millefeuille cache entre ses strates de multiples facettes. Le chef nous laisse la liberté de verser une huile de noisette délicate. On dose alors notre envie de gourmandise à notre guise. Pour une fois on déguste comme on le souhaite, sans injonctions de la part du maître d’hôtel. Tout au long du voyage, la découverte de nombreuses herbes alimentent notre curiosité, on se laisse bercer par la nouveauté. Rien n’est jamais trop, ni pas assez. On apprécie la sincérité, l’harmonie des assiettes et du service, les saveurs qui ne sombrent jamais dans une démonstration ostentatoire. Sur la fin, on écarquille encore grand les pupilles et les papilles à l’arrivée du plateau de fromage, 100% local « nous n’allons même pas dans l’Isère ». Grandiose.
Avant de reprendre la route, l’incontournable Chartreuse requinque notre esprit pantelant. On entend les coucous retentir une dernière fois, comme le réveil matin qui extirpe du sommeil. Non, nous n’avons pas envie de nous réveiller. Incroyable magie du rêve, surtout quand il est réalité.
De ces assiettes qui ressemblent toute à une œuvre d’art émanent fraîcheur, pureté et délicatesse… c’est plus fort que moi, je fonds…
Que c’est beau! ça donne envie de casser sa tirelire pour découvrir ce lieu magnifique!!
que de poésie, tant dans l’assiette que dans l’évocation… il y a en effet des saveurs qui appellent à la découverte, à la révélation, et comme dit précédemment, gavons le cochon de la tirelire pour espérer y goûter un jour nous aussi…
merci pour ce billet !!
Merci Claire !!
post scriptum : avez-vous été aussi à la Bouitte ??
http://www.la-bouitte.com/
Vu un reportage TV sur ces deux hommes et leur établissement, en avais l’eau à la bouche…
Non mais il est dans ma liste des « urgents » :p
Quelle belle plume pour décrire avec enthousiasme ton ressenti de ce repas chez Manu …bravo
Merci Mercotte !