Le Gargouillou
C’est un plat qui semble absolument irréel. Dans son infinie beauté il cache une complexité rare. Les nuances et les couleurs semblent surnaturelles. Il s’en dégage une lumière éblouissante, presque énigmatique, qui n’a rien à voir avec le soleil qui rayonne à travers les vitres. Si nous avons déjà tous admiré de nombreuses assiettes époustouflantes, les minutes passent avant que chacun ne s’empare de ses couverts. C’est la première fois que je dévisage autant un plat. Pas d’inspection ou de tentative d’analyse, non. Juste une naïve contemplation. Le silence est religieux, personne ne semble prêt à plonger dans la fresque.
Les herbes, les légumes, les fleurs (et tellement d’autres trésors) sont posés ici et là. La nature semble vouloir reprendre ses droits dans l’assiette. Pourtant ici c’est le cuisinier qui décide quelle saveur va s’épanouir dans votre palais. D’une bouchée à l’autre on passe sur de notes qui se mélangent, qui s’opposent, parfois mêmes au point d’être désagréables. C’est déroutant, singulièrement délectable. Ce plat ne m’a pas emmené la tête dans les champs ou dans les pâturages. Non, ce n’est pas aussi simple. C’est bien plus insaisissable que ça. Et lorsque je découvre la naissance de ce plat, je comprends mieux pourquoi.
« Le gargouillou est apparu lors d’un de mes « voyages intérieurs ». Imaginé un mois de juin, quand les pâtures sont inondées d’une myriade de fleurs, de parfums. Quand une légère brise du nord l’anime de sons, et balade les parfums alentours. Quand les architectures des fleurs, des tiges, des fruits, les sculptures des branches touchent à l’imaginaire. Cette création est le fruit de la maturité de l’homme et du cuisinier. Je le conçois comme une pièce de bravoure avec laquelle je suis totalement en phase, de mon plus intime à mon sens le plus aigu de gourmandise. À la fois : palettes de légumes, de fleurs, de semences rythmés par les niac ; morceau de musique, ponctué de tempo ; tableau de couleurs, d’architectures… Un méli-mélo empreint de liberté qui se capture du regard, se grappille, se croque, se fond… Un hymne à la saison. Dans la tradition, le nom de gargouillou, issu du patrimoine auvergnat, désignait un plat de pomme de terre, mouillé d’eau et ajusté d’une tranche de jambon de montagne. Le chant de cette appellation, mon amour du potager, ma fascination pour la nature m’ont guidée vers cette interprétation. » Michel Bras
Pour comprendre ou vous essayer à cette recette : clic.
Michel et Sébastien Bras – Laguiole – www.bras.fr
à part des jeunes pousses et des fleurs, il y a quoi, alors, dedans ??
Différents condiments, artichaut, jambon, une sauce, champignons, des graines germées… Ca n’a peut être pas l’air mais c’est vraiment complexe dans la construction des goûts, les mélanges de saveurs.
Quelques détails ici http://www.bras.fr/site_blanc/pdf/gargouillou.pdf
Ma mère m’a promis de m’inviter chez Bras pour mon diplôme d’école d’ingénieur…J’ai encore plus hâte! Magnifique photo, c’est toi qui l’a prise?
C’est un joli cadeau qui se profile donc :)
Yes it’s me !
Rien que d’y repenser ça me donne des gargouillis !